Publicité en cours de chargement...
SI-DEP, la schizophrénie guette le RSSI/DPO
Bref, le confinement est propice à des réflexions délicieusement inutiles dans ce genre, et la dernière en date concerne le SI-DEP, l’application nationale sur laquelle les hôpitaux et laboratoires doivent renseigner les identités (entre autres informations) des personnes infectées par le Covid, dans le but de pister la propagation de l’épidémie, mettre les bonnes personnes en quarantaine, etc. Si vous me demandez mon avis sur cette application, je vais immanquablement vous retourner une autre question : à quel « Cédric » vous adressez-vous ? Le RSSI ? Le DPO ? Le professionnel travaillant dans un CHU ? Ou le citoyen ?
Le RSSI ne peut que tiquer légèrement devant l’envoi de données sensibles (personnelles et de santé) à une plateforme nationale, pour laquelle les habilitations d’accès ont été retoquées par différentes instances (accès trop larges, notamment pour le médico-social), et qui vont être exploitées par des entreprises privées. Certes, les données sont anonymisées, mais on sait que, globalement, l’anonymisation ne vaut pas tripette. Sans parler du fait qu’une telle masse de données ne peut qu’aiguiser l’appétit de certains acteurs plus ou moins recommandables. J’en profite d’ailleurs pour rappeler que cette base de données est parfaitement candidate à la technique d’avatars, développée par WeData, sur laquelle j’ai déjà écrit quelques lignes[2].
Le DPO, quant à lui, ne se sent pas spécialement concerné par ce traitement. Selon un texte de loi, son établissement n’est que sous-traitant et pas responsable de traitement. À partir de là, en dehors des mentions légales d’affichage, la responsabilité de son établissement ne peut pas être engagée (à condition, bien entendu, que les prérequis de sécurité soient satisfaits, comme le canal chiffré de communication d’envoi, la minimisation des données envoyées, etc.). Si une entité doit rendre des comptes, ce sera le donneur d’ordre (État, ministère, etc.).
L’agent hospitalier, pour ce qui le concerne, ne peut qu’être d’accord avec cette mesure. Quand on sait ce qu’ont souffert les personnels médicaux et soignants, le nombre global de morts sur le territoire (et ce n’est malheureusement pas terminé), toute mesure est bonne à prendre : il n’y a même pas débat.
Le citoyen est par contre globalement opposé à cette mesure. Non que sa santé et celle des autres ne le préoccupent pas, bien au contraire, mais parce qu’il fait le bilan – il faut toujours faire un bilan ou une évaluation – entre ce qui est gagné et ce qui est perdu. Et c’est tout le problème : si on sait à peu près clairement ce qui est perdu (toujours moins de confidentialité de la donnée médicale, qui n’en avait pas besoin tant la confidentialité en question est en train de devenir un mythe ou un vœu pieux), on a un peu de mal à savoir ce qui va être gagné. Rien, absolument rien, n’apporte la preuve de l’efficacité d’un tel dispositif : les pays africains qui ont eu à lutter contre Ébola et d’autres épidémies du même tonneau ont gagné la bataille avec des mesures simples, back to basic :les masques, la désinfection, l’isolement, la distanciation physique, etc. L’Islande, chez qui le taux d’utilisation de ces dispositifs IT est un des plus élevés au monde, fait le bilan de la faible efficacité de ce genre de dispositifs[3] et préconise plutôt les tests massifs. Bref, tant que l’on ne m’aura pas prouvé que ce dispositif est efficace, je serai très méfiant.
Bon, je dois vous laisser, c’est bientôt le déjeuner et je dois débattre avec moi-même : la cuisse ou l’aile, fromage ou dessert, éclair au café ou tartelette aux fraises.
[1] https://www.youtube.com/watch?v=xqSKawORrPo&list=PLtzmb84AoqRRgqV5DfE_ykuGQK-vCJ_0t&index=16
[2] /article/3669/anonymisation-comparatif-de-trois-outils-partie-ii.html
Avez-vous apprécié ce contenu ?
A lire également.

Contourner les règles, faille cyber éternelle et consubstantielle à l’espèce humaine
21 avril 2025 - 19:07,
Tribune
-Récemment, un post sur LinkedIn racontait l’histoire suivante : un enseignant soucieux de repérer les élèves qui faisaient rédiger leur copie par ChatGPT transmettait ses consignes sous forme de fichiers PDF dans lesquels il incluait des morceaux de texte en caractères blancs, donc invisibles pour l...

Panorama forcément non exhaustif du fléau des arnaques en ligne en ce début 2025
08 avril 2025 - 07:19,
Tribune
-Le temps des mails provenant d’un prince nigérian qui requiert votre aide pour toucher un héritage, ou de la petite Marie qui attend désespérément une greffe, est révolu : les techniques ont évolué, les outils aussi, les réseaux se sont structurés et professionnalisés. Petit panorama, forcément inco...

Ségur numérique : Mise à jour du calendrier réglementaire pour les dispositifs de la Vague 2 à l’hôpital
24 mars 2025 - 20:32,
Actualité
- DSIH,Afin de garantir au plus grand nombre d’établissements de santé l’accès aux mises à jour financées par le Ségur numérique, le calendrier des dispositifs dédiés aux logiciels Dossier Patient Informatisé (DPI) et Plateforme d’Interopérabilité (PFI) a été étendu par un arrêté modificatif, publié ce jou...

Loi sur le narcotrafic et fin du chiffrement : analyse d’un membre éminent et actif du CVC
10 mars 2025 - 19:33,
Tribune
-Vous n’avez pas pu le rater : sous couvert de lutte contre le trafic de stupéfiants, la proposition de loi d’Étienne Blanc et de Jérôme Durain, déjà adoptée à l’unanimité au Sénat, sera débattue au mois de mars à l’Assemblée nationale. Baptisée « loi Narcotrafic », elle vise à obliger les services d...